Conception et Usage pour apprendre avec le numérique
Quelles places de la conception et de l’usage dans les recherches sur les dispositifs d’apprentissage intégrant des “environnements numériques” ?
En tant que chercheuse en psychologie, active depuis quelques années maintenant au sein de la communauté EIAH, ma compréhension du domaine est la suivante. Pour moi : les EIAH sont un domaine de recherche dédié à la conception d’environnements numériques dans le but de favoriser l’apprentissage (mais également l’autonomie, le pouvoir d’agir, etc.) ; le processus de conception est dirigé par des modèles, des méthodes et des données ; l’analyse d’usage a pour objectif de renseigner le processus (itératif) de conception et de permettre une transformation de l’EIAH de sorte à ce qu’il réponde aux objectifs, c’est-à-dire favoriser l’apprentissage ; les technologies numériques étudiées sont le plus souvent des technologies conçues par les chercheurs de la communauté et pour la recherche ; le domaine EIAH s’intéresse aux analyses d’usage de technologies “non produites” par la recherche (par exemple, un LMS comme Moodle) si leurs résultats peuvent contribuer à faire émerger de nouvelles pistes de recherche (en termes de conception). Ainsi, je me demande si ma représentation du domaine, et surtout de la place de la conception et de l’usage au sein du domaine, est partagée. Il m’intéresse de connaître vos représentations pour en identifier des différences car je crois que c’est une discussion autour de ces différences qui permet une meilleure définition du domaine. Je me demande également dans quelle mesure la conception est perçue comme étant principalement un objectif informatique et si tel est le cas, cela pourrait expliquer les raisons pour lesquelles les chercheurs en sciences humaines et sociales peuvent rencontrer des difficultés à se sentir pertinents au sein de la communauté. En effet, les chercheurs en psychologie ou en sciences de l’éducation sont formés pour décrire et expliquer… et il peut donc leur être difficile de comprendre combien leur contribution (décrire et expliquer) est importante pour concevoir et re-concevoir des technologies numériques qui favorisent l’apprentissage.
Gaëlle Molinari, le 22 juin 2020.
Dernière mise à jour : 23 juin, 2020 - 08:21

creffay
23 juin, 2020 - 13:23
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L'ATIEF veut-elle restée centrée sur la Conception ?
Si la politique ATIEF est de rester centrée sur l'aspect design, conception, informatique, l'intitulé EIAH s'inscrit alors bien dans un courant théorique historique dont le champ conceptuel est défini avec des concepts précis. Le fait d'en changer risque de faire perdre la spécificité de cette conférence mais peut être pour l'ouvrir à d'autres champs disciplinaires qui travaillent sur d'autres concepts au regard du numérique. Il me semble qu'aujourd'hui ce sont surtout des chercheurs provenant de l'informatique qui sont davantage interpellés par cette orientation EIAH et moins ceux des sciences humaines et sociales comme la sociologie ou les sciences de l'éducation.
Posté par C. Reffay pour
Françoise POYET
Psychologue
Professeur des Universités
INSPE-Université Claude Bernard Lyon 1
Laboratoire ELICO-Lyon 1
nguin
16 septembre, 2020 - 19:40
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Entièrement d'accord
En tant que chercheuse en informatique, je suis entièrement d'accord avec le texte de Gaëlle décrivant le rôle de l'analyse d'usage dans le domaine EIAH et son articulation avec la conception. Nous sommes d'accord aussi sur les objectifs de notre domaine. Ce texte me paraît important à conserver pour le travail de clarification que nous menons actuellement. De mon point de vue la conception n'est pas seulement un objectif informatique et la contribution des chercheurs en SHS est indispensable au processus de conception et de re-conception.
luengo
18 septembre, 2020 - 09:38
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Et la modélisation des phénomènes liées aux EIAH
Bonjour,
Je suis assez d’accord avec le texte de Gaelle, mais il me semble que dans les EIAH, du moins du point de vue historique, la conception, et toutes les méthodes associées, sont une des approches mais pas la seule ?
Ainsi, un des champs historiques, et important dans le domaine, est la modélisation de l'apprenant. Cette modélisation peut ne pas avoir comment objectif la conception d’un EIAH. L’objectif, et les méthodes associés, peuvent être de comprendre les phénomènes d’interaction entre l’apprenant et un objet d’apprentissage (la géométrie par exemple) et de proposer des modèles calculables de ces phénomènes (Van Lehn, Koedinger, …).
L’article de Michel Baker (IJAIED 2007) indique trois rôles de modèles : « model as scientific tools, model as component and model as basis for design ». Il me semble que les trois sont dans les champs des EIAH et font appel à des méthodes différentes.
Vanda Luengo
Professeure d'informatique
MOCAH, LIP6
Sorbonne Université
esanchez
25 septembre, 2020 - 15:32
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La fin et les moyens
Comme nous l'avons évoqué dans la discussion générale de ce forum, la conception d’un dispositif semble centrale dans notre communauté. Ces dispositifs servant à la fois de réification d’un modèle et d’outil expérimental.
Cela tend à exclure de facto les chercheurs qui s'intéressent à d'autres questions (sociologie des usages par exemple) et l'intervention de Françoise Poyet dans ce forum le montre bien. Il nous semble donc que deux pistes d'évolution sont possibles. Une première, très inclusive, consisterait à élargir le champ des travaux qui peuvent se reconnaître sous la bannière EIAH. Cela pourrait constituer un enrichissement considérable dans le sens où l'approche serait plus systémique. Mais il y a probablement un danger de dilution de nos travaux dans domaine mal circonscrit et sur des champs déjà investis par d'autres communautés. Une autre vision, beaucoup plus restrictive, met la conception du dispositif au coeur de nos travaux dans une contribution scientifique duale : 1) comme une fin : des dispositifs numériques sont construits pour servir dans un contexte donné ou comme outil expérimental 2) et comme moyen : des modèles théoriques contribue à la création des dispositifs, la mise ne œuvre des dispositif contribuant au raffinement des modèles théoriques.
N. Mandran et E. Sanchez pour le GT Epistémologie