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Comprendre les processus de construction et de
régulation des EPA par des étudiants universitaires
Joris FELDER (Université de Fribourg)
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RÉSUMÉ : Cet
article situe les processus de construction et de régulation de
l’environnement personnel d’apprentissage par
l’étudiant en tant qu’objet de recherche. Il développe
un modèle qui conceptualise l’EPA comme le produit d’une
activité d’apprentissage dans laquelle des processus de
construction et de régulation de l’EPA sont réalisés
par l’étudiant en interaction avec sa perception du dispositif de
formation et la définition de son projet d’apprentissage. Ce
modèle, utilisé de manière exploratoire pour analyser les
cas de cinq étudiants universitaires, permet de décrire ces
processus. Nous en discutons l’intérêt heuristique, les
limites et les perspectives.
MOTS CLÉS : Environnement
Personnel d’Apprentissage, autorégulation environnementale,
stratégies, instruments. |
Understanding construction and regulation processes of university student's personal learning environment |
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ABSTRACT : This
article positions the construction and regulation process of personal learning
environment as a research object. It develops a model which conceptualise the
PLE as the products of a learning activity, in which construction and regulation
processes of the PLE are conducted by the student in interaction with the
student’s perception of the learning system and his own definition of his
learning project. This model is used to analyse five cases of university
students, and allows to describe the construction and regulation process of the
PLE. We discuss the heuristic value, as well as the limits and perspectives.
KEYWORDS : personal
learning environment, self-regulation, strategies, instruments. |
1. Introduction
Considérer que
l’étudiant utilise des outils, des ressources et des personnes qui
n’ont pas été prévus initialement par les concepteurs
d’un dispositif d’apprentissage et qu’il constitue ainsi son
Environnement Personnel d’Apprentissage (EPA), c’est renouveler la
compréhension de l’apprentissage aujourd’hui. Les dispositifs
d’apprentissages ouverts tels que les MOOCs (Massive Open Online Courses)
laissent, par leur conception de l’apprentissage, percevoir le plein
potentiel des EPA (Henri, 2014).
Mais ce potentiel s’exprime également dans des dispositifs de
formation, qu’ils soient à distance, hybrides, traditionnels (en
classe), ou encore dans l’apprentissage au-delà des
frontières des contextes formels de formation (Charlier, 2014).
En effet, si la notion d’EPA n’est pas nouvelle en soi – les
étudiants ont toujours dû construire et organiser leur
environnement – c’est avec l’émergence du web 2.0 et
des changements dans nos rapports au savoir et à l’apprentissage,
ainsi que dans l’abondance et la diversification des ressources
d’apprentissage, que l’environnement de l’étudiant se
complexifie et se transforme.
Afin de soutenir les étudiants, les formateurs et autres acteurs
impliqués dans l’ingénierie pédagogique, il est
nécessaire de développer une compréhension solide des
processus de construction et de régulation de l’EPA par
l’étudiant. Prendre conscience de ces processus doit permettre
à l’apprenant de mettre en œuvre des actions
métaréflexives et métacognitives orientées vers son
EPA, facteur de réussite d’un projet d’apprentissage. Au
formateur, la connaissance de ces processus doit permettre de prévoir des
interventions pédagogiques en connaissance de cause et d’agir au
niveau méthodologique. Enfin, la compréhension de ces processus
doit permettre aux concepteurs pédagogiques d’anticiper les
divergences entre EPA des étudiants et environnements prescrits au regard
des objectifs pédagogiques ciblés.
A notre connaissance, la littérature ne définit pas les
processus de construction et de régulation de l’EPA par
l’étudiant en tant qu’objet de recherche au sens de Davallon (Davallon, 2004),
ou ne l’est du moins encore qu’à un stade exploratoire. Or,
pour rendre intelligible ce processus, il est nécessaire de disposer
d’un cadre d’analyse solide. Pour combler cette lacune, nous
proposons tout d’abord une construction de cet objet de recherche à
partir d’éléments théoriques (partie 2), reprenant
des pistes apportées par divers auteurs, notamment celles
rassemblées en 2014 dans un numéro spécial de la revue
STICEF (Peraya et al., 2014).
Sur cette base, nous développons un modèle conceptuel (partie 3)
qui explicite des variables individuelles cognitives et socio-cognitives, ainsi
que des variables contextuelles et instrumentales considérées
comme déterminantes dans ces processus. Ce faisant, nous formulons
l’hypothèse que les processus de construction et de
régulation de l’EPA par l’étudiant sont
déterminés par son projet d’apprentissage (objectifs et
critères d’évaluation), le dispositif de formation
(artefacts pédagogiques, didactiques, techniques et sociaux), des
variables personnelles (approches d’apprentissage, schèmes
d’utilisation, stratégies de régulation de l’EPA) et
par l’EPA lui-même (instruments et systèmes
d’instruments qui le composent).
Pour contribuer à une meilleure compréhension des processus de
construction et de régulation de l’EPA par l’étudiant,
nous avons mené une recherche empirique à partir de notre
hypothèse, appliquant notre modèle conceptuel comme cadre
d’analyse. Les objectifs et la méthode sont exposés dans la
partie 4. Nous analysons l’évolution des EPA et des interactions
entre les variables de notre modèle, les effets des instruments
eux-mêmes sur le processus, ainsi que des conduites et des
stratégies de régulation orientées vers l’EPA. Les
résultats sont présentés dans la cinquième partie et
discutés à la partie 6. Il convient ici de relever la dimension
itérative de notre démarche : le modèle conceptuel
constitue un cadre d’analyse menant aux résultats et ces
résultats ont permis de réviser le modèle conceptuel.
2. Construction de l’objet de recherche
Dans ce chapitre, nous construisons l’objet de
recherche en concevant l’EPA comme un phénomène qui se
caractérise par sa nature subjective (Väljataga et Laanpere, 2010),
par le recours aux technologies (mais pas exclusivement) et par la mise en
œuvre d’un nouveau paradigme pédagogique (partie 2.1). Nous
postulons dans les parties suivantes que l’EPA est l’un des produits
d’une activité d’apprentissage (partie 2.2), activité
dans laquelle ont lieu des processus de construction de l’EPA (partie
2.2.1) et de régulation de cet EPA (partie 2.2.2).
2.1. L’EPA, entre technologie, approche pédagogique et
réalité subjective
Le travail que nous entreprenons dans cette recherche est tributaire de la
complexité de la notion d’EPA. À l’origine de la
notion d’EPA se trouvent trois éléments
problématiques : (1) les plateformes d’e-learning
conçues de manière monolithique et centralisatrice ne sont pas
adaptées aux possibilités des technologies et aux pratiques
sociales actuelles ; (2) l’apprenant doit pouvoir se responsabiliser
en prenant le contrôle de ses apprentissages et en choisissant librement
les technologies avec lesquelles il apprend ; (3) l’apprentissage
tout au long de la vie doit être soutenu et valorisé (Henri, 2014, p. 5).
Selon la problématique à laquelle ils s’intéressent,
les auteurs appréhendent l’EPA comme un assemblage d’outils
technologiques, comme une des composantes à prendre en compte dans les
conceptions pédagogiques, ou encore comme une réalité
subjective (Henri, 2014). Or,
c’est dans leur caractère complémentaire que ces diverses
approches peuvent répondre aux problématiques qui sont à
leur origine.
Ainsi, notre conception de l’EPA reprend aux approches technologiques (Gillet et Li, 2014), (Ivanova et Chatti, 2011), (Alharbi et al., 2013) la définition de l’environnement comme : « une
composition spontanée et éventuellement
éphémère de canaux de communication, de ressources
distribuées du cloud, d’applications web et de réseaux
sociaux, assemblée de manière agile et partagée en
ligne ; définissant un contexte d’interaction pour une
activité d’apprentissage ou de gestion de connaissance
donnée (...) » (Gillet, 2013, p. 1).
Cette définition limitant l’environnement à sa dimension
technologique, il est nécessaire de l’étendre en
considérant également les ressources non-numériques et
humaines que l’apprenant utilise dans son activité
d’apprentissage (Väljataga et Laanpere, 2010), (Roland, 2014), (Charlier, 2014).
Si cette définition a le potentiel d’être adaptée aux
possibilités des technologies et des pratiques sociales actuelles, elle
ne suffit pas, selon nous, à distinguer les EPA des autres environnements
numériques d’apprentissage.
Pour que la notion d’EPA puisse correspondre au deuxième
élément problématique mentionné plus haut, il nous
paraît nécessaire de concevoir l’EPA comme un environnement
d’apprentissage et subjectif, au sens de Väljatage et Laanpere,
c’est-à-dire « un environnement (...) qui est
personnel si l’individu exerce un contrôle sur celui-ci, (...),
qu’il a l’opportunité de le concevoir, d’y
accéder, de l’utiliser, de le modifier et d’y attacher du
sens » (Väljataga et Laanpere, 2010, p. 282). En d’autres termes, l’EPA est un environnement propre à
chaque apprenant, susceptible de varier d’un individu à un autre,
conçu au moins en partie par l’apprenant ou par le groupe, comme le
proposent (Charlier, 2014) et (Heutte, 2014).
Enfin, cette notion d’EPA exprime selon nous son plein potentiel si et
seulement si nous l’appréhendons comme une composante à
considérer dans les approches pédagogiques, tant du point de vue
de l’enseignant et des concepteurs que du point de vue de
l’apprenant désireux de diriger son apprentissage. C’est donc
au regard de la finalité qu’est l’apprentissage que nous nous
intéressons dans cette recherche à l’EPA propre à
chaque étudiant, composé de ressources technologiques
numériques, non numériques et humaines, construit et
régulé par l’étudiant.
2.2. L’EPA : le produit d’une activité
d’apprentissage
Après avoir défini notre conception de la notion d’EPA,
il s’agit maintenant d’établir l’appareil notionnel
soutenant notre conceptualisation des processus de construction et de
régulation de l’EPA par l’étudiant. Comme
d’autres, nous proposons qu’il y a construction de l’EPA par
l’étudiant (partie 2.2.1) (Peraya et Bonfils, 2014), (Roland et Talbot, 2014), (Charlier, 2014), (Henri, 2014) et
qu’il y a régulation de cet EPA (partie 2.2.2) (Drexler, 2010), (Dabbagh et Kistansas, 2011), (Kravcik et Klamma, 2012), (Charlier, 2014), (Jézégou, 2014), (Heutte, 2014).
Tout d’abord, nous situons ces processus de construction et de
régulation de l’EPA dans un système d’activité,
au sens de la théorie de l’activité (Engeström, 1999).
Il est composé de six éléments placés en interaction
dans une représentation bi-triangulaire : le sujet, l’objet,
les artefacts médiateurs, les règles, la communauté, la
division de la tâche. Ce système, qui prend en compte
« la fondamentale nature culturelle et sociétale de
l’activité humaine » (Engeström, 1999, p. 22),
fournit en effet un cadre pour étudier les processus de construction et
de régulation de l’EPA. Il amène à analyser
l’action du sujet en distinguant ses différentes composantes.
Ainsi, l’analyse ne se focalise pas sur les ressources numériques,
non-numériques et humaines que le sujet utilise, mais privilégie
l’observation de l’activité dans son ensemble. De plus, le
système d’activité permet de « mettre en
lumière les contradictions et les tensions entre les différentes
composantes » de l’activité (Henri, 2014).
Buchem, Attwell et Torres ont utilisé la théorie de
l’activité pour identifier les composants des EPA en tant que
système (Buchem et al., 2011).
Ces composants ont été catégorisés selon les six
pôles du modèle d’activité. Toutefois, leur
application de la théorie de l’activité ne convient pas
à l’étude de la construction et de la régulation de
l’EPA. Selon nous, il est plus pertinent de modéliser
l’activité d’apprentissage en tant que système (figure
1) dont les composantes sont définies de la manière suivante. Le
sujet est l’étudiant ; les artefacts médiateurs sont
les ressources numériques, non-numériques et humaines utiles
à l’activité d’apprentissage ; l’objet est
le projet d’apprentissage ; les règles sont celles du contexte
d’apprentissage dans lequel l’étudiant évolue, la
communauté est constituée du groupe-classe et de la
communauté d’intérêt correspondant à
l’objet d’apprentissage ; enfin, la division du travail
résulte de l’organisation de la situation d’apprentissage en
question. Dans ce système, l’EPA est défini comme l’un
des produits de l’activité d’apprentissage.
Figure 1 • Application du
modèle d’Engeström à l’activité
d’apprentissage conceptualisée comme un système
2.2.1. Un processus de construction d’un système
d’instruments
Le processus de construction d’un EPA se conceptualise par
l’approche instrumentale (Rabardel, 1995),
ce que d’autres avant nous ont également soutenu (Perraya et Bonfils, 2014), (Roland et Talbot, 2014), (Charlier, 2014).
Dans cette perspective, les ressources sont des artefacts. Ils deviennent des
instruments lorsque le sujet leur associe des schèmes
d’utilisation, par des processus d’instrumentation (processus
orientés vers le sujet qui font évoluer les schèmes
d’utilisation) et d’instrumentalisation (processus dirigés
vers l’artefact qui le font évoluer). L’instrument,
constitué d’un artefact et de schèmes d’utilisation,
est « considéré comme une entité
intermédiaire, voire un univers intermédiaire entre deux
entités que sont le sujet, l’acteur, l’utilisateur de
l’instrument et l’objet sur lequel porte l’action » (Rabardel, 1995, p. 89).
L’artefact est un médiateur potentiel des relations entre le sujet
et l’objet « existant dans une activité et étant
constamment transformés par l’activité » (Rabardel, 1995, p. 34),
l’objet étant ici le projet d’apprentissage de
l’étudiant. Ces instruments sont regroupés en
systèmes d’instruments (Rabardel et Bourmaud, 2005).
L’individu les utilise pour remplir les fonctions prévues par les
concepteurs, mais aussi pour les fonctions qu’il aura
développées lui-même. Le système d’instruments
se développe donc dans l’usage. Roland et Talbot ont bien rendu
compte de l’organisation de l’EPA de l’étudiant comme
un système d’instruments (Roland et Talbot, 2014).
2.2.2. Un processus de régulation de l’EPA
En plus du processus de construction de l’EPA en tant que
système d’instruments, nous concevons qu’il existe, au sein
de l’activité d’apprentissage, un processus de
régulation de l’EPA. Par ce postulat, nous invoquons, comme
d’autres (Drexler, 2010), (Dabbagh et Kistansas, 2011), (Kravcik et Klamma, 2012), (Charlier, 2014), (Jézégou, 2014), (Heutte, 2014),
le champ thématique de l’autorégulation de
l’apprentissage, qui propose en effet que les étudiants
« initient des stratégies personnelles pour renforcer les
produits et les environnements d’apprentissages » (Zimmermann, 2008, p. 1).
L’ensemble d’instruments construits par l’étudiant
évolue donc au cours de l’activité d’apprentissage.
Cette évolution n’est pas uniquement due aux facteurs externes
à l’étudiant, comme le dispositif d’apprentissage ou
l’intervention du formateur, mais elle est également mise en
œuvre par l’étudiant.
Comment l’étudiant procède-t-il alors à
l’autorégulation de son EPA ? Nous pouvons le concevoir
à partir du mécanisme de la boucle de rétroaction
négative. Comme le rappelle Cosnefroy, ce mécanisme issu des
études en cybernétique est utilisé pour étudier le
fonctionnement humain et en dégager des modèles. Le champ de
l’autorégulation de l’apprentissage, mais aussi plus
largement les champs de la psychologie du travail et des organisations, de la
psychologie de la santé ainsi que de la psychologie de
l’éducation s’appuient sur ce mécanisme (Cosnefroy, 2011).
Selon la boucle de rétroaction négative, un agent contrôle
un système en comparant son état à un moment T à un
état souhaité. En cas d’écart entre
l’état actuel et l’état souhaité, une action
est entreprise afin de le réduire. Ainsi, l’étudiant,
constatant par des conduites métacognitives (Zimmermann, 2008) que son environnement ne lui permet pas de réaliser la tâche comme
il le souhaite, est amené à mettre en œuvre une
stratégie pour ajuster son EPA.
3. Modélisation de l’objet de recherche
À partir de nos conceptions de l’EPA et
des processus de construction et de régulation de l’EPA qui
précèdent, nous avons développé un modèle
conceptuel (figure 2) permettant d’expliciter ces processus dans leur
complexité. Le modèle s’articule en trois composantes
principales : dispositif de formation, projet d’apprentissage
personnel et activité d’apprentissage. Les processus de
construction et de régulation de l’EPA sont
représentés par des flèches. Ces derniers ont pour acteur
le sujet (étudiant) et pour produit l’environnement personnel
d’apprentissage. Pour opérationnaliser les objectifs de description
et de compréhension de ces processus, nous faisons appel à des
variables individuelles cognitives et sociocognitives : les approches
d’apprentissage (Marton et Säljö, 2005),
les schèmes d’utilisation (Rabardel, 1995) et les stratégies de régulation (Zimmerman, 2008).
Nous faisons également appel à des variables contextuelles de
dispositif et instrumentales : les artefacts pédagogiques,
didactiques, techniques (Marquet, 2005) et sociaux (notre apport) ; les instruments et les systèmes
d’instruments (Rabardel, 1995).
Le projet d’apprentissage tel que le conçoit le sujet
(étudiant) est représenté par les objectifs et les
critères d’évaluation que l’étudiant
définit pour lui-même. Ces variables, et peut-être
d’autres encore, interagiraient dans les processus de construction et de
régulation de l’EPA par l’étudiant. Dans les parties
3.1 à 3.3, nous décrivons le modèle et expliquons les
variables invoquées.
Figure 2 • Modèle conceptuel des
processus de construction et de régulation de l'EPA
3.1. Dispositif de formation
Le dispositif de formation est représenté par un ensemble
d’artefacts qui le constituent et que le sujet (étudiant) doit
s’approprier dans le cadre de son activité d’apprentissage.
En effet, l’étudiant s’approprie les artefacts
pédagogiques, didactiques, techniques du dispositif de formation, selon
la proposition de Marquet (Marquet, 2005),
et les artefacts sociaux (notre apport, voir partie 5.1.3), se créant
ainsi un instrument d’apprentissage. La double-flèche entre le
dispositif de formation et l’environnement personnel d’apprentissage
représenterait en ce sens les processus d’instrumentalisation et
d’instrumentation « des objets particuliers de la culture que
sont les contenus d’enseignement et de formation » (Marquet, 2005, p. 115).
Nous séparons les artefacts du dispositif de formation et l’encart
EPA puisque ces artefacts ne font pas partie de l’environnement
d’apprentissage du sujet (étudiant) tant que celui-ci ne se les est
pas approprié.
3.2. Activité d’apprentissage
L’activité d’apprentissage est à la base de ce
modèle, elle en est le fondement. La construction et la régulation
de l’EPA sont deux processus qui interviennent dans
l’activité d’apprentissage qui a pour objet le projet
d’apprentissage. Influencés par le dispositif de
formation, ils sont mobilisés en support à ce projet et
donnent lieu à l’EPA, l’un des produits de
l’activité d’apprentissage (voir partie 2.2).
3.2.1. Sujet (étudiant)
Pour les besoins de l’analyse, nous distinguons le sujet
(étudiant) de l’activité d’apprentissage, ce qui est
représenté par le décalage entre ces deux encarts. Nous
postulons que les approches d’apprentissage activées par
l’étudiant dans un cours sont en interaction avec les instruments
et systèmes d’instruments qu’il construit. Elles le seraient
également avec les stratégies de régulation de l’EPA
qu’il applique. Par ailleurs, il a été
démontré que les approches d’apprentissage sont en
interaction avec les objectifs et les critères d’évaluation
que l’étudiant définit pour son projet d’apprentissage (Marton et Säljö, 2005).
Les schèmes d’utilisation que le sujet (étudiant) met en
œuvre dans son utilisation des instruments ont à leur tour une
influence sur les choix qu’il fait en regard de son EPA. Finalement, le
dispositif de formation interagit avec les variables du sujet (étudiant),
tout comme son projet d’apprentissage. En d’autres termes, les
variables du sujet (étudiant) évoluent au cours de
l’activité et sont situationnelles.
3.2.2. Environnement personnel d’apprentissage
De même que le sujet (étudiant) se distingue de son
activité, nous considérons que l’EPA est construit et
régulé pour une activité d’apprentissage
donnée, mais qu’il n’est pas pour autant purement ponctuel et
limité à cette activité. Ainsi, le sujet (étudiant)
est amené à réutiliser son EPA en tout ou en partie dans
d’autres activités d’apprentissage. L’EPA est donc
conceptualisé comme un environnement propre au sujet (voir partie 2.1),
dont une instance existe pour une situation d’apprentissage
spécifique. Ceci est représenté par le décalage
entre les deux encarts Environnement personnel d’apprentissage et Activité d’apprentissage. Parmi les variables intervenant
dans la construction et la régulation de l’EPA se trouvent les
instruments et les systèmes d’instruments construits par le sujet
(étudiant) au fil de son activité d’apprentissage (Roland et Talbot, 2014), (Flückiger, 2014), (Charlier, 2014).
Les artefacts faisant partie de ces instruments sont liés au contexte de
l’activité d’apprentissage et sont, dans une certaine mesure,
influencés par les prescriptions du dispositif de formation.
Nous postulons également que les instruments constitués par le
sujet (étudiant) ont eux-mêmes une influence sur
l’évolution de l’EPA. Deux notions permettraient de le
concevoir : la notion de conflit instrumental et la notion de contrainte.
Marquet propose la notion de conflit instrumental pour « rendre
compte de l’impossibilité pour l’apprenant
d’instrumenter et d’instrumentaliser l’ensemble des
artefacts » (Marquet, 2010, p. 127).
Ainsi, le sujet (étudiant), confronté à une
difficulté d’appropriation d’un artefact didactique,
pédagogique ou technique de la situation d’apprentissage, serait
amené à faire évoluer son EPA, afin de tendre vers la
réussite de son activité. Rabardel aborde quant à lui les
effets des instruments sur l’activité par la notion de
contrainte : les instruments opposent des contraintes en un sens et ouvrent
des possibles en un autre (Rabardel, 2005).
3.3. Le projet d’apprentissage personnel
Finalement, le projet d’apprentissage est
représenté par les objectifs et les critères
d’évaluation que définit l’étudiant. En
d’autres termes, nous considérons que l’étudiant
s’approprie les objectifs et les critères d’évaluation
prescrits par le dispositif de formation et qu’il en définit
d’autres, qui lui sont propres. L’activité de
l’étudiant a pour objet son projet d’apprentissage, qui est
donc en interaction avec les variables du sujet (étudiant) et celles de
l’EPA.
4. Objectifs et méthode de recherche
Notre premier objectif est de décrire les
variables du modèle conceptuel des processus de construction et de
régulation de l’EPA par l’étudiant et leurs
interrelations. Nous entendons ainsi mieux comprendre ces processus. Notre
deuxième objectif est d’éprouver la valeur heuristique du
modèle que nous proposons.
Pour atteindre ces deux objectifs, nous avons mené une étude
empirique exploratoire. Nos données sont issues d’une étude
de cas auprès de cinq étudiants de cycle master évoluant
dans un même cours universitaire d’un programme en Sciences de
l’éducation. Le cours se déroulait sur un semestre, en
partie en présence et en partie à distance. Les étudiants y
réalisaient un projet authentique, dans le sens où le
scénario du cours reproduisait une situation professionnelle, à
savoir la conception d’un devis de dispositif de formation à
distance (Henri, 2013). Le
choix du contexte et des sujets est motivé par la possibilité
d’accéder à un discours d’étudiants
habitués à utiliser les technologies et à parler de leurs
apprentissages. Deux entretiens semi-dirigés d’explicitation (Albarello, 2007) espacés dans le temps ont été menés avec chacun des
cinq étudiants. Lors du premier entretien, nous leur avons demandé
de représenter schématiquement leur EPA. À cette occasion,
nous leur avons expliqué la notion d’EPA et nous les avons
encouragés à représenter leurs ressources
numériques, non numériques et humaines qu’ils utilisent dans
le cadre du cours, illustrant nos propos par des exemples et en les questionnant
sur la manière et les buts de leurs emplois. Cette gestion des entretiens
est voulue pour pallier le manque de représentation commune et formelle
de la notion d’EPA et pour favoriser une description la plus exhaustive
possible. Entre les deux entretiens, les étudiants ont apporté des
modifications à leur schéma initial, afin de refléter
l’évolution de leur EPA. L’espacement dans le temps entre les
deux entretiens allait permettre de déceler une évolution dans les
EPA et de permettre au chercheur d’obtenir du sujet des précisions.
Nos analyses ont été faites à partir des verbatim en
mettant en œuvre la technique d’analyse catégorielle (L’Ecuyer, 1990).
Un système de catégories a été élaboré
en appliquant une démarche mixte. Ainsi, certaines catégories sont
déduites du cadre théorique et d’autres sont
élaborées de manière inductive. Les résultats
d’analyse ont été proposés séparément
pour lecture aux cinq sujets de l’étude. Cette démarche ne
constitue pas pour autant une validation de nos interprétations par les
acteurs.
5. Résultats
Dans la suite, nous mettons en lumière les
relations entre les éléments de notre modèle conceptuel, en
présentant les résultats de nos analyses des cinq cas
étudiés selon les quatre étapes suivantes :
- décrire la singularité et l’évolution
des EPA des étudiants au regard du dispositif de formation et
l’interprétation qu’ils en font, selon les raisons
qu’ils donnent à l’inclusion et à l’exclusion
d’une ressource, ainsi qu’en rapport avec leur projet
d’apprentissage (partie 5.1) ;
- identifier les approches d’apprentissage que les
étudiants activent dans le cours et leurs relations avec les
configurations distinctes d’EPA (partie 5.2) ;
- expliciter l’influence des instruments construits par
l’apprenant sur la construction et la régulation de l’EPA
à partir de la notion de contraintes qu’ils opposent à
l’étudiant (Rabardel, 1995) et par la notion de conflit instrumental (Marquet, 2005) (partie 5.3) ;
- décrire les conduites d’autorégulation ainsi
que les stratégies spécifiques de construction et de
régulation de l’EPA mises en œuvre par les étudiants au
cours de l’activité d’apprentissage et comment elles
interviennent (partie 5.4).
5.1. Des environnements évolutifs et subjectifs dans un dispositif de
formation contraignant
5.1.1. Prescriptions du dispositif de formation
Nous avons analysé le guide de cours (Henri, 2013),
l’environnement médiatique utilisé et la retranscription
d’un entretien réalisé avec la professeure dispensant le
cours, afin de repérer quels artefacts didactiques, pédagogiques
et techniques sont prescrits par le dispositif du cours.
Au rang des artefacts didactiques, nous relevons trois thèmes
principaux : les fondements de la formation à distance,
l’ingénierie pédagogique et le concept
d’environnement d’apprentissage à distance. Les objectifs
formulés sont : « comprendre les fondements
pédagogiques et organisationnels de la formation à distance ;
appliquer une démarche d’ingénierie pédagogique pour
la conception d’un environnement d’apprentissage à
distance ; utiliser la technique de modélisation des connaissances
comme support à la conception d’un environnement
d’apprentissage » (Henri, 2013, p. 1).
Les artefacts pédagogiques sont multiples. Le cours propose aux
étudiants de s’approprier les contenus et d’atteindre les
objectifs formulés par la réalisation d’un projet
intégrateur simulé (Prégent et al., 2009) authentique. Les étudiants, en tandem, jouent le rôle de jeunes
concepteurs pédagogiques, travaillant au sein d’un bureau
d’experts-conseils. Ils doivent répondre au besoin de formation
d’un client fictif. Le résultat de ce travail prend la forme
d’un devis de formation. Le devis est réalisé de
manière itérative : les étudiants produisent une
version du devis, la professeure, qui joue le rôle de mentor dans
l’entreprise, retourne des commentaires, les étudiants produisent
une nouvelle version. En guise de préparation, les nouveaux concepteurs
entreprennent des lectures spécifiques à l’ingénierie
pédagogique et à la formation à distance. Ils
réalisent également un billet d’opinion personnel à
propos de la formation à distance. Dans le but d’engendrer le
débat et la réflexion, chacun commente les billets de deux autres
étudiants. De plus, dans une démarche réflexive, chaque
étudiant réalise au terme du cours un bilan de ses apprentissages (Henri, 2013).
Finalement, des artefacts techniques sont prévus par la conceptrice du
cours et par l’institution de formation. Sur la plateforme Moodle de
l’Université, un espace pour ce cours est à disposition des
étudiants. Un guide d’étude, une feuille de route, des
présentations PPT, des textes, un canevas de devis, un outil de
planification du travail, des exemples de devis et le logiciel de
modélisation MOT+ sont mis à disposition. Trois forums internes au
Moodle sont prévus, dans lesquels les étudiants devront
déposer un billet d’opinion et débattre de la formation
à distance. Lors des phases à distance, la communication avec la
professeure se fait par le courrier électronique, les forums de
l’espace du cours sur la plateforme Moodle de l’Université et
Skype. Au cours de l’activité, la professeure prescrira encore aux
étudiants de lui transmettre leurs documents réalisés sous
format Word. Les prescriptions portent exclusivement sur des artefacts
techniques numériques.
5.1.2. Interprétation du dispositif de formation par
l’étudiant
Nous avons demandé aux étudiants de schématiser leur EPA
et d’expliciter l’utilisation qu’ils en font, ainsi que leur
évolution. Illustrons par le cas d’Alice. En décrivant la
situation d’apprentissage dans laquelle elle se trouve, Alice mentionne la
présence d’artefacts didactiques et d’artefacts
pédagogiques, au sens
de (Marquet, 2005) :
« C’est un cours hybride, une partie qui se donne à
distance, une partie en présence (artefact pédagogique), qui porte
sur l’enseignement à distance (artefact didactique). Initialement,
ce cours est donné dans une télé-université. Le
contenu principal a trait à l’e-learning : les dispositifs
d’apprentissage dans un contexte d’e-learning... (artefact
didactique), nous avons pour tâche de réaliser un devis, de
réaliser un dispositif de formation, enfin, de simuler un dispositif de
formation dans un contexte d’enseignement à distance, avec une
analyse préliminaire, une conception préliminaire (artefact
pédagogique) ».
En décrivant son EPA et en expliquant sa manière de travailler,
Alice mentionne également la présence d’artefacts techniques (Marquet, 2005) numériques et non numériques, ainsi qu’humains : SMS,
Skype, Google Drive, e-mail, Moodle, notes de cours, contenu du cours, lectures
de cours, contenus d’autres cours, Word, Power Point, PDF,
l’ordinateur, internet, calendrier, le forum et MOT+. Dans son EPA, des
ressources humaines sont également présentes : la
professeure, la partenaire de travail, les collègues de classe. Le
discours sur son EPA est plus complet que le schéma de son EPA
lui-même (figure 3). Ce constat se retrouve dans les cinq cas que nous
avons étudiés.
Figure 3 • Schéma de
l’EPA d’Alice
5.1.3. Des artefacts sociaux en sus des artefacts didactiques,
pédagogiques et techniques
De notre analyse ressort un quatrième type d’artefact : des
artefacts sociaux. Prenons l’exemple des règles de
collaboration. Alice a mentionné utiliser Google Doc pour
élaborer le devis de formation. L’utilisation de Google Doc
(artefact technique) pour rédiger (artefact didactique :
méthode d’apprentissage) le devis de formation (artefact
didactique : contenu, savoirs, compétences) en fait un instrument
médiateur de son activité d’apprentissage. Néanmoins,
cet instrument n’est pas complet. En effet, Alice dit plus loin :
« les idées, je les soumettais à
Valérie ». Il s’agit là d’une règle de collaboration qu’elle et sa collègue se sont
fixées et qui influe sur leur processus d’apprentissage. Si dans un
tandem, les étudiants se répartissaient les tâches sans
confronter leurs idées mutuellement, le processus d’apprentissage
serait en effet autre. L’instrument permettant à Alice
d’apprendre est ainsi constitué d’un artefact
pédagogique, d’un artefact didactique, d’un artefact
technique et d’un artefact social.
Ce type d’artefact se retrouve dans chacun des cinq cas que nous avons
analysés. Nous avons relevé la présence de règles
de collaboration, d’une règle sociale impliquant
qu’un étudiant sentant avoir trop de lacunes n’ose pas faire
appel à un professeur (« Il y avait beaucoup de choses que
je n’avais pas compris, alors je me sentais plus à mon aise si je
demandais aux collègues plutôt qu’à la
professeure », Eric), d’une règle portant sur
la reconnaissance de la qualité d’un artefact (« Bon
ça paraît naturel de faire des présentations PowerPoint,
mais ce n’est pas obligatoire. Mais on le fait parce que les
étudiants le font et on se dit que si on ne le fait pas, voilà, ce
sera un petit peu minimaliste », Alice) et d’une
règle impliquant qu’un étudiant ne fasse appel à un
professeur qu’après avoir essayé d’autres
démarches (« On peut contacter la professeure. On peut lui
poser des questions. (...) On pouvait lui écrire, mais
c’était pas la première chose qu’on pouvait
faire », Béatrice).
Dès lors, nous proposons de compléter le schéma de
l’emboîtement des artefacts en situation d’apprentissage avec
les TIC de Marquet (Marquet, 2010),
en intégrant les artefacts sociaux (figure 4).
Figure 4 • Emboîtement des artefacts en
situation d'apprentissage avec les instruments, adapté de Marquet (Marquet, 2010, p. 126)
5.1.4. Singularité des EPA
Les EPA des étudiants présentent, d’une manière
générale, de grandes similitudes. Tous les étudiants
utilisent un outil de messagerie courte (SMS, Whatsapp ou iMessenger),
l’e-mail, la plateforme Moodle, les lectures de cours, Word, un lecteur
PDF, le guide de cours, les exemples de devis, les travaux des autres groupes,
le forum, le logiciel MOT+, l’ordinateur, ainsi que les ressources
humaines que sont la professeure, le partenaire de travail et les autres
étudiants du cours.
Toutefois, les EPA comportent certaines différences tant par les
artefacts dont ils sont constitués que par les schèmes
d’utilisation particuliers des étudiants. Par exemple, bien que le
tableau de planification individuelle et le tableau de planification de groupe
soient une exigence du cours, seule une étudiante, Béatrice, en
parle explicitement. Une autre particularité se trouve chez cette
même étudiante, qui a eu recours à un appareil photo pour
transmettre un document de travail à sa partenaire, alors que le logiciel
(en l’occurrence MOT+) intègre un outil de transfert :
« Je ne voulais pas utiliser mon ordinateur avec le logiciel MOT,
sinon elle [la collègue de tandem] n’arrivait pas à
l’ouvrir. Donc je préparais sur papier, je le photographiais et
puis je lui envoyais par Whatsapp ». Eric, pour sa part, est le
seul à mentionner l’aide des amis et de la famille. Il est
également le seul à ne pas utiliser Google Drive pour la
rédaction en collaboration du devis. Alice, quant à elle, utilise
Google Drive, mais sans pour autant utiliser l’outil de messagerie
instantanée interne, contrairement aux trois autres étudiantes qui
utilisent Google Drive. De même, relevons qu’Alice utilise Google
Drive et Skype lorsqu’elle collabore avec sa partenaire, alors que
Béatrice et Chloé utilisent Google Drive et des outils de
communication écrite. Nous noterons encore que seule une étudiante
a utilisé l’outil de présentation de Google Drive, alors que
trois autres personnes utilisent l’outil de traitement de texte de Google
Drive.
Enfin, nous constatons que quatre des cinq étudiants ont
utilisé des outils non numériques à certains moments pour
analyser, structurer, synthétiser, s’approprier ou
schématiser des connaissances. Utiliser des ressources
non-numériques dans un dispositif pourtant fortement
numérisé paraît répondre à des besoins des
étudiants : « J’ai l’impression que je
m’approprie mieux la matière quand je réécris
à la main » (Alice). Passer par le
« papier-crayon » est notamment justifié par les
étudiants pour un apprentissage jugé plus efficace, pour
réaliser différentes fonctions (analyser, structurer, obtenir des
connaissances) ou par habitude d’usage : « Je
stabilobosse et puis j'écris des mots-clés. J'ai besoin des
mots-clés car si je dois revenir sur un concept, je cherche le
mot-clé. Ah oui, c'était là, alors je recherche
encore » (Béatrice). De même, on relève la
place importante accordée aux ressources humaines dans les EPA des
étudiants : « Si je ne savais pas quelque chose, si
j’avais des doutes, je lui [la professeure] demandais »
(Chloé).
5.1.5. Dynamique des choix dans l’évolution de l’EPA
Afin de décrire l’évolution des EPA des étudiants,
nous leur avons demandé d’expliciter la raison de la
présence (respectivement de la non présence) d’une ressource
dans leur EPA. Nous avons analysé ces discours à l’aide du
schéma de quête (Piret et al., 1996) qui permet de visualiser les relations entre l’objet convoité, le
sujet et les actions qu’il mène, ainsi que de représenter
adjuvant et opposant aux actions. La figure 5 illustre le cas de
Chloé.
L’étudiante intègre une ressource à l’EPA,
afin de satisfaire les raisons fonctionnelles (« Je dois faire des
schémas, des sortes de maps conceptuelles »), qualitatives
(« Je suis toujours sur l’ordinateur, pour gagner du
temps »), de contraintes (« Quand on était
à distance, on utilisait le chat de Google Drive » ;
« J’utilise Word parce que la professeure le
demande ») et de pratiques personnelles (« Dropbox,
c’est toujours celle que j’utilise »).
L’efficacité pour le travail de groupe (« C’est
plus facile [de partager] si ce sont des notes
électroniques ») et l’habitude d’usage
personnelle ou communautaire sont des éléments adjuvants à
cette action. Chloé exclut une ressource de son EPA si elle
préfère se débrouiller par elle-même ou par
économie de temps (« on n’a pas discuté avec la
professeure [par Skype] parce qu’on s’est laissées prendre un
petit peu par le temps »). L’habitude d’usage
personnelle ou communautaire, le fait de ne pas penser à la ressource, ne
pas oser demander ou encore le fait d’éviter de compliquer le
travail sont des éléments renforçant la décision
d’exclure une ressource. On notera encore que ces catégories de
raisons ne sont pas mutuellement exclusives. Nous avons identifié des
dynamiques similaires dans les quatre autres cas.
Figure 5 • Dynamique de la décision de
Chloé d'inclure et d’exclure une ressource à l'EPA
5.1.6. Un projet d’apprentissage personnel
Un projet d’apprentissage comporte minimalement des objectifs et des
critères pour en évaluer l’atteinte. Dans le tableau 1, nous
avons réuni les objectifs personnels que les étudiants ont
explicités lors des entretiens, en cherchant à respecter leurs
formulations. Nous avons classé ces objectifs selon qu’ils
correspondent à des savoirs, des savoir-faire ou des savoir-être.
Il n’est pas exclu que les étudiants aient poursuivi, même
temporairement, d’autres objectifs. Notons qu’il n’est pas
forcément aisé de conscientiser ses objectifs, comme le souligne
Alice : « au début du cours, on n’a pas
forcément d’objectif, on attend que le cours se déroule et
que les objectifs apparaissent au fil du cours ». Dans le tableau,
les initiales entre parenthèses correspondent aux étudiants qui
ont mentionné ces objectifs.
Tableau
1 • Objectifs personnels des étudiants
Savoirs |
Savoir-faire |
Savoir-être |
•Comprendre les notions liées à l’apprentissage
à distance (A)
•Apprendre la méthode d’ingénierie
pédagogique (B) |
•Concevoir un dispositif de formation à distance (A, B, C, D,
E)
•Utiliser les notions liées à l’apprentissage
à distance (A)
•Modéliser des connaissances selon le langage MOT (C)
•Développer les compétences TIC (A)
•Gérer son temps (C)
•Mettre en pratique des habilités d’étudiants (C)
•Être critique (C)
•Questionner (C) |
•Apprendre dans la collaboration (A, D)
•Se distancer du rôle d’étudiant pour
s’approprier celui d’ingénieur pédagogique (C, D)
•Apporter un complément à son partenaire (A)
•Être autonome (C)
•Vivre une expérience de formation à distance et juger
des avantages et des difficultés (E)
•Comprendre les émotions et les frustrations des
étudiants en formation à distance (E) |
Formuler des critères d’évaluation de son travail se
révèle également être une tâche peu
évidente. Ainsi, Alice et Eric parlent essentiellement de leurs
rôles respectifs et de celui de la professeure dans
l’évaluation de la qualité du travail. Eric estime avoir la
légitimité concernant le contenu d’apprentissage qu’il
propose dans son dispositif de formation, alors qu’il se
réfère entièrement à la professeure pour ce qui est
de la qualité du devis lui-même. Chloé et Delphine se
rejoignent en ayant pour critère la cohérence du contenu du devis.
Béatrice, quant à elle, a pour critère de satisfaction la
maîtrise des concepts et la capacité à comprendre les devis
de dispositifs de formation à distance.
5.2. Approches d’apprentissage et types d’EPA
La deuxième étape de notre analyse a consisté à
identifier les approches d’apprentissage que les étudiants activent
dans le cours et leurs relations avec les configurations distinctives
d’EPA. Aux approches en profondeur et en surface (Marton et Säljö, 2005) s’ajoute l’approche stratégique (Entwistle, 2009).
Nous illustrons dans un premier temps le cas d’Alice et nous
complétons par une analyse inter-cas.
En reprenant ses études, Alice poursuit le projet de changer de voie
professionnelle. D’une manière générale, elle cherche
à « apprendre pour l’avenir » (il
s’agirait là d’une approche inédite, ce que nous
discutons à la partie 6.3.1). En effet, elle mentionne : « j’essaie toujours de me projeter », de « prendre tout ce que je juge utile, réutilisable pour la
suite ». Dans le contexte du cours retenu pour cette recherche,
cette volonté d’apprendre pour l’avenir la pousse à
essayer de « bien comprendre toutes ces notions par rapport
à l’apprentissage à distance, pour pouvoir être
capable de les utiliser ». Cela se manifeste par des objectifs
d’apprentissage concrets et par des conduites métacognitives : « Et je me dis : j’aimerais bien pouvoir le
réaliser, utiliser ce modèle au delà du cours. Si
j’ai l’occasion de l’utiliser au delà du cours. Parce
qu’il est très pertinent ». Cette réflexion
l’amène à activer une approche d’apprentissage,
renforçant son intérêt pour la tâche.
Si l’approche « apprendre pour l’avenir » est
nettement dominante, Alice la complète par une approche
stratégique, manifestée par la poursuite de l’objectif
pragmatique de réussir le cours : « Mes objectifs,
déjà assez terre-à-terre, c'est déjà de
réussir le cours ».
Ces manifestations d’engagement fort dans l’apprentissage peuvent
toutefois être affaiblies sous certains aspects, notamment lorsqu’il
s’agit de déterminer des attentes envers un cours, ce qui semble
indiquer une approche en surface : « Et puis ce n’est
pas trop mon style d'aller regarder dans le détail l'intitulé des
cours sur Gestens (et les objectifs). J'ai pas cette curiosité
là... j'attends de voir un peu. Je pense qu'il y a des étudiants
qui sont plus scrupuleux et puis qui ont des attentes très
précises par rapport à un cours. Moi, ce n’est pas vraiment
mon cas ».
Parmi les cinq cas étudiés, quatre d’entre eux activent
différentes approches au fil du cours. En effet, selon l’aspect du
cours ou des apprentissages, le discours varie fortement. Ainsi, Delphine dit
« pour la première partie, pour l’analyse,
c’était pour moi plus intéressant, donc je me suis plus
engagée. ». Mais plus loin elle dit « (...)
sur les parties de conception médiatique, c’était assez
technique, donc je ne suis pas allée vraiment en détail à
comprendre pourquoi, j’ai écrit ce que je pouvais écrire et
voilà, je me suis limitée à ça ».
Un étudiant semble n’adopter que l’approche en surface
« on n’était pas vraiment motivé à aller
encore plus loin dans les détails. (...) Et puis on a envoyé [le
travail], on n’a même pas tout relu, parce qu’on
était... pas fatigué, mais on voulait vraiment envoyer et terminer
le travail » (Eric). Enfin, dans le cas de Chloé, aucune
donnée ne semble indiquer qu’une des trois approches qu’elle
a invoquées ne soit plus présente qu’une autre.
Le tableau 2 indique les approches d’apprentissage activées par
les étudiants. Les prénoms marqués en gras renseignent sur
l’approche prédominante de l’étudiant.
Tableau
2 • Approches d'apprentissage activées par les
étudiants
Apprendre pour l’avenir |
Approche en profondeur |
Approche stratégique |
Approche en surface |
Alice
Béatrice |
Béatrice
Chloé
Delphine |
Alice
Chloé |
Alice
Chloé
Delphine
Eric |
5.3. De l’influence des instruments dans l’évolution de
l’EPA
Pour la troisième étape de notre analyse, nous avons
cherché à expliciter l’influence des instruments construits
par les étudiants sur la construction et la régulation de
l’EPA selon deux perspectives : le conflit instrumental (Marquet, 2010) et les contraintes (Rabardel, 1995).
5.3.1. Conflits instrumentaux
Nous avons identifié un conflit instrumental résultant de
l’incompatibilité de l’un des artefacts pédagogiques
et techniques prévus par le cours avec un artefact social propre au
groupe d’étudiants. Le scénario pédagogique
prévoyait en effet que les étudiants commentent les billets
d’opinion de leurs collègues sur la formation à distance
dans le forum de la plateforme Moodle. Or, ce groupe d’étudiants
n’est pas habitué à interagir au sein d’un forum en
ligne (« C’était pas le premier réflexe, de se
dire on va dans le forum », Béatrice). Ils se rencontrent
régulièrement en présence dans le cadre des cours et
à la cafétéria où ils échangent
régulièrement (« on se voit [à la
cafétéria, dans d’autres cours]. Dans une situation
où on ne se voit pas du tout, peut-être que le forum aurait
marché spontanément », Chloé). Il semble que
les étudiants aient donc essentiellement adapté leur EPA en
réalisant cette activité en présence, constituant ainsi un
instrument différent.
5.3.2. Contraintes des instruments
Nous avons également analysé l’influence des instruments
sur l’évolution de l’EPA à partir de la notion de
contrainte. En partant des catégories proposées par Rabardel, nous
retrouvons dans notre analyse, des contraintes sur les modalités
d’existence (« on a beaucoup travaillé avec
l’ordinateur de Béatrice, parce que le mien c’est un Mac,
donc je n’ai pas la possibilité de créer des sous-groupes
[dans le logiciel MOT+] », Chloé), des contraintes
de finalisation (« Avec Word, on doit choisir des moments pour
travailler dessus, tandis qu’avec Drive on peut être plus flexible.
Mais on utilise Word parce que sinon ça prend trop de temps par la suite
pour changer la mise en page », Chloé) et des contraintes
de structuration (« Maintenant on travaille sur le scénario
avec Google Drive. Mais dans deux ou trois semaines, on doit l’envoyer
à la professeure. Elle nous envoie les feedbacks », Chloé). Ces contraintes que les instruments opposent à
l’étudiant l’amèneraient à considérer
l’état de fonctionnement de son EPA comme inadéquat et donc,
à mettre en œuvre une stratégie pour effectuer un ajustement
sur l’EPA, le rendant ainsi à nouveau fonctionnel. Delphine
explique par exemple qu’elle devait utiliser pour ce cours le logiciel
MOT+ pour modéliser un scénario pédagogique et ainsi
acquérir les connaissances de ce langage de modélisation et
développer la compétence de modélisation. Elle n’a
pas pu utiliser ce logiciel en raison de problèmes techniques et
d’affinités et a décidé de modéliser son
scénario sur du papier (« J’ai pas bien aimé la
modélisation, donc j’ai préféré faire avec mes
petites flèches, comme ça »). On peut
considérer que l’artefact lui a opposé une contrainte et
qu’en réaction, elle a développé un nouvel instrument
en utilisant un autre artefact technique, adaptant ainsi son système
d’instruments. Chacun des cinq étudiants fait face à des
contraintes issues des instruments. Les artefacts concernés varient.
5.4. Régulation de l’EPA
La quatrième étape de notre analyse a consisté à
décrire les conduites métacognitives mises en œuvre par les
étudiants, ainsi que les stratégies de régulation
spécifiquement orientées vers l’EPA.
5.4.1. Des conduites métacognitives
En se remémorant l’élaboration de son EPA, Alice se
rappelle avoir réalisé que les ressources fournies sur Moodle ne
suffiraient pas (conduite d’orientation). Elle ne pense toutefois
pas avoir mené de conduite de planification de son EPA :
« je pense que je ne devais pas avoir une idée
précise de mon EPA ». À la fin du dernier entretien,
elle partage une réflexion démontrant d’autres conduites de
stratégies métacognitives, orientées directement vers son
EPA, ainsi qu’une stratégie de régulation de l’EPA
qu’elle aurait pu mettre en œuvre (se faire une image mentale de
son EPA) :
« J’avais l’impression de naviguer un petit peu en
aveugle dans ce cours (conduite d’évaluation). Et je
n’avais pas une image mentale très claire des ressources que
j’avais à disposition pour ce cours ou les ressources que je
voulais me donner pour ce cours. Et il aurait peut-être été
utile (conduite d’élaboration), par souci de clarté,
au début du cours pour moi, de me faire cette image mentale, en me disant
mais tiens, de quoi est-ce que je dispose pour mener à bien ce
travail ? (conduite de planification) ».
Mener ces conduites ne se ferait pas de manière systématique
par chaque étudiant. En effet, Alice mentionne par exemple
qu’après réflexion, elle aurait trouvé pertinent de
se faire une image mentale de son EPA au début du cours (conduite de
planification), alors que Chloé aurait réellement mené une
telle conduite en se faisant la réflexion que, s’agissant
d’une situation de travail en collaboration à distance,
l’outil Google Drive serait l’outil idéal.
5.4.2. Des stratégies de régulation de l’EPA
Les étudiants ont également mis en œuvre des
stratégies amenant à un ajustement de l’EPA. De notre
analyse, nous recensons cinq stratégies initiées par les
étudiants, ainsi qu’une stratégie non initiée par
l’étudiant lui-même, que nous illustrons ci-après.
La stratégie d’activation de systèmes
d’instruments habituels correspondrait à des actions
entreprises par l’étudiant qui le mènent à
sélectionner des ressources qu’il a utilisées auparavant.
Ces ressources lui sont connues et font partie de son environnement
standard : « Et nous on les utilise partout pour faire des
travaux de groupe (...) On est parti de Google Drive, puis pour s’envoyer
les choses c’est toujours les mails, pour discuter c’est toujours
WhatsApp ou par oral. Donc ce n’est pas qu’on a décidé
"on fait ça". Il n’y a pas des outils bizarres qu’on
n’utilise jamais » (Chloé).
La stratégie d’adaptation d’un système
d’instruments consisterait à intégrer une ressource
connue à un système déjà activé, à
exclure une ressource de ce même système ou encore à adapter
ses schèmes d’utilisation des ressources. Dans la séquence
suivante, Chloé passe de l’ordinateur au papier et enfin à
l’ordinateur pour s’adapter à un
obstacle : « Je fais tout sur l’ordinateur, je ne
prends pas de notes à la main. Mais au début, avec
Béatrice, vu qu’on était un peu perdue, on voyait ce projet,
c’était vraiment abstrait, hyper abstrait, donc on a fait une sorte
de scénario provisoire du cours qu’on voulait proposer. On a
écrit un peu : Qu’est-ce qu’on fait ?
Pourquoi ? Mais à la main. On a fait avec un fil rouge comme
ça. Mais après, on a toujours travaillé sur
l’ordinateur, donc rien sur papier ». Distinguer
cette stratégie de la précédente se justifie dès
lors que l’on considère que l’EPA de l’étudiant
à un instant T n’intègre pas forcément toutes les ressources habituelles.
Se distinguant des deux stratégies précédentes, la
stratégie de recherche d’aide matérielle serait mise
en œuvre lorsque l’étudiant éprouve le besoin
d’intégrer des ressources encore non connues à son EPA.
C’est typiquement le cas de la recherche de documents :
« En tout cas, au début, il y a eu d’autres recherches
sur Internet, pour justement pouvoir concrétiser un petit peu le
thème qu’on avait choisi. On est allée voir chacune de notre
côté les sites Internet des universités de Neuchâtel
et de Fribourg et puis voir ce qui était proposé en journalisme
dans ces universités » (Alice).
Dans le même sens, la recherche d’aide d’autrui consisterait à requérir l’apport d’une autre
personne pour, par exemple, obtenir une explication ou afin de co-réguler
son apprentissage. Alice dit en ce sens : « il y a un truc que
je ne comprenais pas. Elle [ma collègue de tandem] m’a
expliqué avec un exemple tout simple et tout d’un coup ça
s’est éclairé. Et finalement elle a réussi à
me faire comprendre quelque chose en deux phrases que la professeure
n’avait pas réussi à me faire
comprendre ».
À ce stade, cette dernière stratégie semble se
distinguer de celle de l’adaptation d’un système
d’instruments et de celle de l’activation de systèmes
d’instruments habituels. Bien que la délimitation entre ces
stratégies ne soit probablement pas complètement nette, recourir
à l’aide d’autrui répondrait à des motivations
autres que le recours à des ressources matérielles. De plus, il
semble que ce soit, en quelque sorte, un acte « inhabituel »
pour les étudiants, comme le mentionnait notamment l’un
d’entre eux : « je n’arrive pas à demander
de l’aide très souvent » (Chloé).
Enfin, se faire une image mentale de son EPA serait une
stratégie facilitant la mise en route de la tâche, telle que le
suggère Alice a posteriori : « J’avais
l’impression de naviguer un petit peu à l’aveugle dans ce
cours. Et j’avais pas une image mentale très claire des ressources
que j’avais à disposition pour ce cours ou les ressources que je
voulais me donner pour ce cours. Et il aurait peut-être été
utile, par souci de clarté, au début du cours pour moi, de me
faire cette image mentale, en me disant "mais tiens, de quoi est-ce que je
dispose pour mener à bien ce travail ?" ».
Au final, nous représentons dans la figure 6 la mise en œuvre de
stratégies menant à l’ajustement de l’EPA. Ainsi,
l’étudiant effectuerait un monitoring régulier de son EPA et
de la situation d’apprentissage et il évaluerait
l’adéquation de son EPA à la réalisation de la
tâche entreprise. En cas d’écart, il mettrait en œuvre
des stratégies et effectuerait un ajustement de son EPA. Cette
dynamique est visible dans les propos de Béatrice :
« Premièrement, on recherchait dans les documents
qu’on avait à disposition sur Moodle. Si on ne trouvait pas, on
recherchait sur Internet, dans Google. Et puis voilà, on écrivait
les mots. Et puis Google. Et puis si on ne trouvait pas, on demandait à
la professeure. Et si on n’était pas encore au clair, ça
s’est passé une fois d’écrire dans le Forum sur
Moodle, de demander [aux autres étudiants du cours] ».
En plus, il est possible qu’une aide extérieure soit
apportée sans que l’étudiant n’en ait manifesté
le besoin : « Le soutien de la famille et des amis,
c’est arrivé par l’extérieur. C’est pas moi qui
ai choisi. Ils me demandaient comment ça allait, qu’est-ce que
j’avais à faire. Mais c’est pas moi qui ai cherché du
soutien » (Eric). Dans ce cas, il déciderait de
l’inclure à son EPA ou non.
Hormis la stratégie se faire une image mentale de son EPA, ces
stratégies ont été repérées chez chacun des
cinq cas étudiés. Des recherches complémentaires seraient
nécessaires pour déterminer quelles stratégies sont
privilégiées et sous quelles conditions.
Figure 6 • Processus de mise en œuvre de
stratégies menant à l'ajustement de l'EPA
6. Discussion
Nous discutons dans la suite nos résultats en
regard du modèle conceptuel que nous proposons et nous relevons des
limites de nos analyses et des perspectives.
6.1. Processus de construction et de régulation de l’EPA
Nos résultats tendent à valider notre modélisation
d’un système d’activité d’apprentissage dont
l’un des produits est l’EPA (figure 1). En effet, tout semble se
dérouler, en partant de l’étudiant comme sujet, de
manière à ce que l’activité soit orientée vers
le projet d’apprentissage. Les résultats permettent
également d’éprouver la force heuristique du modèle
conceptuel des processus de construction et de régulation de l'EPA
proposé (figure 2). La construction d’un EPA en système
d’instruments (Rabardel, 1995), (Flückiger, 2014), (Roland et Talbot, 2014) issu des interactions entre les artefacts didactiques, pédagogiques,
techniques (Marquet, 2005) et sociaux mène à identifier des conflits instrumentaux (Marquet, 2005) et des contraintes sur l’activité dues aux instruments (Rabardel, 1995).
Nous avons également pu voir que les étudiants mettent en
œuvre des conduites métacognitives au sujet de leur EPA et des
stratégies de régulation directement orientées vers lui. Ce
faisant, il fait évoluer son EPA, construisant de nouveaux instruments et
systèmes d’instruments. Aussi, la construction et la
régulation de l’EPA ne seraient pas amorcées uniquement par
l’étudiant, mais également issues d’un mouvement
induit par les artefacts et les instruments et systèmes
d’instruments de l’EPA lui-même.
Dès lors, les différences entre EPA, ainsi que les
différences entre EPA et dispositif prescrit par le formateur pourraient
avoir une influence sur l’atteinte des objectifs d’apprentissage.
Ainsi, dans le tandem, un travail en alternance revient à une
démarche coopérative plutôt que collaborative. La
co-construction des savoirs n’a probablement plus lieu. De même, le
travail entre les étudiantes étant cumulatif, il est fort probable
que chacune n’ait pas mis en œuvre toutes les activités leur
permettant d’atteindre personnellement tous les objectifs du cours. Cette
idée est très bien formulée par Folcher :
« L’appropriation et la constitution d’instruments dans
l’usage sont caractérisées dans les termes d’une
genèse instrumentale qui transforme à la fois l’organisation
de l’activité des sujets, les tâches qu’ils
s’attribuent, les activités qu’ils réalisent et les
caractéristiques de l’artefact » (Folcher, 2005, p. 190).
De plus, les compétences d’autorégulation pouvant
être développées par les étudiants (Zimmermann, 2008),
ces résultats invitent à mettre en œuvre des recherches pour
identifier sous quelles conditions les étudiants peuvent apprendre
à concevoir et réguler des EPA performants pour leurs projets
d’apprentissage et correspondant à leurs propres
caractéristiques. Il s’agit également d’identifier
quelles stratégies sont les plus efficaces dans des situations
données.
Prendre conscience de ces phénomènes peut aider
l’étudiant à faire de meilleurs choix lorsqu’il initie
une stratégie de régulation de son EPA. En termes
d’ingénierie pédagogique, cela incite à
prévoir l’impact de l’appropriation par
l’étudiant des artefacts prescrits sur le déroulement de
l’activité d’apprentissage et sur l’atteinte des
objectifs prescrits. Aussi, il s’agit d’envisager la mise en lien
des dimensions numériques et non numériques des environnements
d’apprentissage. Enfin, le formateur pourrait anticiper les
répercussions de l’évolution des EPA de ses étudiants
et envisager des interventions ciblées. Dans le même sens, il peut
amener les étudiants à réfléchir à la
composition de leur EPA et à son adéquation avec leurs projets
d’apprentissage et avec le cours.
Une première limite de nos résultats tient à ce que nous
nous basons uniquement sur les propos des étudiants. Les données
sont dépendantes de la volonté et de la capacité des sujets
à exprimer leurs réflexions et leurs représentations de
leur activité d’apprentissage. D’autres dispositifs de
recueil de données, tels que des observations ou des enregistrements des
activités pourraient constituer un apport important.
Enfin, une seconde limite de notre travail réside dans le fait que
nous avons identifié uniquement des stratégies visant à la
régulation des artefacts techniques et humains. En amont de notre
analyse, nous avions en effet considéré que les artefacts
didactiques, pédagogiques et sociaux sont stables tout au long de
l’activité d’apprentissage. Il pourrait être
enrichissant d’identifier de quelle manière ces artefacts
évoluent et si ces évolutions sont également le
résultat de stratégies mises en œuvre par
l’étudiant ou uniquement des résultantes.
6.2. Influence du dispositif et du projet d’apprentissage
Nos résultats montrent que le dispositif de formation a une influence
forte sur la composition de l’EPA. On y retrouve des artefacts techniques
directement prescrits par le dispositif de formation et d’autres qui le
sont de manière plus indirecte (voir 5.1). Nous pouvons concevoir que la
présence de ces derniers résulte en partie de
l’interprétation que se font les étudiants des autres types
d’artefacts du dispositif de formation que sont les artefacts
pédagogiques, didactiques et sociaux. Néanmoins, face au
même dispositif, aux mêmes contraintes et aux mêmes besoins
fonctionnels, la composition des artefacts d’un EPA diverge d’un
étudiant à un autre (voir partie 5.1.4). Les raisons de ces
différences semblent pouvoir s’expliquer par des raisons
d’habitudes de pratiques personnelles et des appréciations
qualitatives que font les individus des différents artefacts (voir partie
5.1.5). Les différences entre l’EPA d’un étudiant et
le dispositif s’expliquent également par l’influence du
projet d’apprentissage tel que se le représente
l’étudiant (voir partie 5.1.6).
Conscientiser ces différences entre l’environnement
d’apprentissage du point de vue de l’étudiant et
l’environnement d’apprentissage du point de vue du formateur ou de
l’ingénieur pédagogique permet à chacun de chercher
à les identifier dans les situations concrètes qu’ils
rencontrent. Par exemple, le formateur pourra se demander à quel point il
est important pour lui que les étudiants utilisent tel artefact
technique. Si cet artefact est médiateur d’une construction de
savoir important, peut-être voudra-t-il en imposer l’emploi. Dans le
cas contraire, peut-être sera-t-il enclin à laisser le libre
arbitre à l’étudiant. De même, l’étudiant
peut prendre conscience que l’articulation des quatre artefacts
techniques, didactiques, pédagogiques et sociaux constitue son instrument
d’apprentissage. Il pourra ainsi évaluer si se distancer des
prescriptions du dispositif en choisissant d’autres artefacts lui
permettra toujours de réaliser son projet d’apprentissage. Il
pourra également choisir des artefacts complémentaires en jugeant
leur adéquation avec les autres dimensions.
Si les éléments ci-dessus semblent pertinents pour expliquer
les différences entre les EPA, ils ne constituent certainement pas les
seules explications possibles. Le croire constituerait un risque de
méconnaissance de l’équifinalité, au sens de
Bertalanffy (Bertalanffy, 1973, p. 38),
repris par Dumez (Dumez, 2015, p. 21) :
« Le même état final peut être atteint à
partir d’états initiaux différents, par des
itinéraires différents ». Annocque (Annocque, 2015) amène en ce sens une perspective intéressante en mettant en
lumière comment la représentation qu’ont les
étudiants des contenus influence la construction de leurs EPA.
C’est là à la fois un intérêt majeur de nos
résultats et une limite importante : appréhender
l’évolution de l’EPA, sa construction et sa régulation
par l’étudiant dans leur complexité ne permet pas
d’isoler de manière précise quel facteur intervient sous
quelles conditions et avec quels effets.
6.3. Influence des approches d’apprentissage
Nous pensions pouvoir mettre en évidence des relations entre
l’approche d’apprentissage activée par un étudiant et
son EPA, ses stratégies de régulation ou ses choix d’inclure
ou d’exclure une ressource. Cependant, les traces dont nous disposons ne
nous ont pas permis de le faire de manière évidente. Nous avons en
effet constaté d’une part que les EPA sont très similaires
dans le contexte de ce cours. D’autre part, l’approche
d’apprentissage évolue au fil de l’activité. En ce
sens, Entwistle relève que l’approche mise en œuvre par un
même étudiant peut varier selon le type de tâche ou
d’enseignant auquel il est confronté (Entwistle, 2009).
Ce constat peut également être dû aux indicateurs que nous
avons prêtés aux différentes approches. En effet, comme le
soulève Entwistle, « la description du processus
impliqué dans une approche en profondeur ne peut pas être
appliquée dans la même forme à chaque domaine
d’étude » (Entwistle, 2009, p. 37).
Néanmoins, nous jugeons la piste pertinente et nous procéderons
à une étude complémentaire. Il est nécessaire de
procéder à un approfondissement théorique et à un
perfectionnement du design de recherche.
6.3.1. Une approche émergente : apprendre pour
l’avenir
Nous avons été confrontés à des propos laissant
présager d’une approche d’apprentissage autre que les
approches stratégiques, en surface et en profondeur. Nous avons
proposé de nommer cette approche « apprendre pour
l’avenir ». Il nous apparaît que « apprendre
pour l’avenir » pourrait être ce que Fyrenious, Wirell et
Silén, cités dans (McCune et Entwistle, 2011),
ont appelé « moving approach ». Dans leur
étude, ils ont été amenés à identifier des
étudiants activant une approche en surface « se satisfaisant
d’une compréhension suffisante pour l’examen (a holding
approach), alors que d’autres étaient prêts à
étendre et restructurer leur compréhension initiale pour relever
les défis professionnels futurs (a moving approach) » (p.
304, notre traduction). Cette moving approach est
« orientée vers les exigences de l’évaluation,
mais également vers une forme de compréhension utile à une
activité professionnelle et une orientation vers une utilité
future de ce qui est appris » (p. 304, notre traduction).
6.4. Validité du modèle conceptuel
Nous avons cherché à développer un modèle
conceptuel des processus de construction et de régulation afin de rendre
intelligible le phénomène observé. Nous avons pu
accéder à des données propres à chaque
élément constitutif du modèle conceptuel et nous avons
également pu mettre ces données en relation. En ce sens, le
modèle se prête bien à décrire les processus de
construction et de régulation de l’EPA par l’étudiant.
De plus, il soutient une codification précise, consistante et
exhaustive des observations empiriques, ainsi que la reformulation des
catégories d’analyse et des hypothèses jusqu’à saturation (Laperrière, 1997, p. 386).
Nous avons en effet pu construire des grilles d’analyse originales en
développant des catégories sur un mode mixte : certaines
découlent des champs théoriques invoqués, d’autres
sont le résultat d’une démarche inductive. Les
éléments constitutifs du modèle conceptuel donnent la
structure des catégories d’analyse. Dans l’ensemble, les
observations empiriques ont pu être codifiées de manière
exhaustive. Pour compléter la validation, il aurait fallu procéder
à une validation de nos interprétations par les sujets
interrogés. Si nous leur avons bien soumis les textes, nous n’avons
pas mis en œuvre une démarche systématique.
Néanmoins, le caractère exploratoire de cette recherche,
s’il permet d’étudier le phénomène en
profondeur et de soulever des hypothèses, limite la
généralisation et la représentativité des
résultats. Des études supplémentaires sont
nécessaires pour diversifier les contextes.
7. Conclusion
Notre contribution à la thématique de
l’EPA propose un modèle conceptuel offrant une clé de
lecture du processus de construction et de régulation de l’EPA dans
sa complexité. Nous l’inscrivons tout d’abord dans la suite
d’autres chercheurs (Buchem et al., 2011) en considérant la construction et la régulation des EPA sous la
perspective de la théorie de l’activité. Ensuite, nous
considérons qu’il existe des variables individuelles cognitives et
sociocognitives, ainsi que des variables contextuelles de dispositif et
instrumentales qui interagissent dans les processus de construction et de
régulation des EPA. Par ailleurs, nous considérons le contexte de
la situation d’apprentissage comme un facteur déterminant. En
outre, nous considérons que la régulation de l’EPA
s’inscrit dans le champ de l’autorégulation de
l’apprentissage, en tant que régulation environnementale. Nous
invoquons l’approche instrumentale de Rabardel (Rabardel, 1995) pour étudier l’appropriation des ressources par les
étudiants. Dans le même sens, nous réinvestissons la
proposition de Marquet de distinguer les artefacts pédagogiques,
didactiques et techniques de l’environnement d’apprentissage
informatisé (Marquet, 2005),
que nous complétons par les artefacts sociaux. Nous considérons
enfin que les instruments eux-mêmes ont des effets sur les processus de
construction et la régulation de l’EPA. Notre recherche explore ces
effets à partir de la notion de contrainte (Rabardel, 1995) et de celle de conflit instrumental (Marquet, 2005).
Amener les étudiants à réfléchir à leur
EPA, à échanger entre eux et à envisager
l’évolution de leur EPA peut contribuer à faciliter leurs
apprentissages et à développer leur autonomie, en vue d’un
« apprentissage au-delà des frontières »,
comme le dénomme Charlier (Charlier, 2014).
Par cette recherche exploratoire, nous pensons avoir pu démontrer
l’intérêt de poursuivre les recherches sur la construction et
la régulation de l’EPA par l’étudiant. Il s’agit
finalement d’instrumenter les étudiants et les formateurs de sorte
que l’étudiant dispose d’un environnement
d’apprentissage propice à l’atteinte de ses objectifs.
À
propos de l’auteur
Joris Felder est doctorant en sciences de
l’éducation à l’Université de Fribourg (Suisse)
et collaborateur scientifique de la leading house Dual-T pour les
technologies dans la formation professionnelle. Ses recherches portent sur les
environnements personnels d’apprentissages. Il s’intéresse
également aux processus d’innovations en contextes de
formation.
Adresse : Université de Fribourg,
Département des sciences de l’éducation, Boulevard de
Pérolles 90, CH. 1700 Fribourg, Suisse
Courriel : joris.felder@unifr.ch
Toile : http://www.unifr.ch/ipg/fr/equipe/joris-felder
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